Approche génétique
Ce que nous savons
Il existe un fort facteur d’hérédité dans la scoliose idiopathique. Le risque de l’apparition d’une scoliose chez les parents est proches est de 6-11%. Des études réalisées chez des jumeaux montrent que les jumeaux monozygotes ont un risque supérieur aux jumeaux dizygotiques de présenter une scoliose.
Néanmoins, l’apparition de la scoliose ne suit pas un modèle simple classique. Au contraire, il s’agit d’un modèle complexe où de nombreux gènes interagissent les uns avec les autres et où le rôle de l’environnement dans lequel l´enfant va grandir est fondamental.
En génétique, le concept d´environnement implique de nombreux facteurs dits épigénétiques : alimentation, maladies, médicaments et toxiques, stress, lieu et hygiène de vie…
Leur rôle est méconnu mais la présence de ces facteurs externes peut conditionner l´apparition de la maladie.
Ce que nous ignorons
Quel est le rôle des variants génétiques
Les voies moléculaires sont difficiles à identifier
Quel rôle joue l´épigénétique?
Quel rôle joue l´environnement
Quelles sont les avancées obtenues grâce aux travaux soutenus par la Fondation Cotrel ?
Une des grandes découvertes des chercheurs de la Fondation, fruit de la collaboration inédite de deux équipes (celle du Professeur Patrick Edery, à Lyon et du Professeur Florina Moldovan à Montréal), est l’identification d’une variante familiale dans la scoliose idiopathique, en particulier la mutation du gène POC 5. Ces travaux ont permis :
- L’identification d´une variante familiale
- La codification d’une protéine centriolaire
- La mise en évidence du rôle important des cils
Dans un modèle de poisson zèbre, l´expression de ce gène a produit des poissons avec des déformations scoliotiques (bien que sans altérations des éléments osseux).
Ces résultats ont validé le rôle de POC5 dans l´apparition de la scoliose idiopathique.
Les travaux du Dr Guillaume Dugué (CNRS Paris) partaient de la mutation du gène Poc5 afin d’étudier les perturbations du développement neurologique, pour déterminer s’ils étaient à l’origine de la scoliose idiopathique. Ces recherches, effectuées sur des souris présentant la modification génétique au niveau du gène POC 5, ont permis d’établir que le POC5 est probablement essentiel pour la formation des cils.
Elles ont montré :
- Au niveau tissulaire : une désorganisation tissulaire du poumon et de la rétine
- Au niveau cellulaire : la présence du gène mutant POC5 induit une diminution de la prolifération cellulaire des ostéoblastes (c’est-à-dire des cellules responsables de la formation osseuse) et de la minéralisation.
Aux Pays-Bas, les travaux du Pr René Castelein et Steven de Reuver (UCM d’Utrecht) sont en cours. Ils portent sur le syndrome de délétion 22q11.2 comme nouveau modèle génétique humain pour la scoliose idiopathique.
Ils se basent sur le fait que la déformation a lieu dans le disque intervertébral et que ceci joue un rôle essentiel dans l´initiation et dans la progression de la scoliose.
L’équipe s’appuie sur l’hypothèse que les enfants qui développent une scoliose présentent des altérations préexistantes au niveau du disque intervertébral. 50 % des patients atteints du syndrome de délétion 22q présentent une scoliose.
40 enfants vont participer à l’étude dont les résultats sont attendus en 2028.
Le Pr Serge Zakine (Hôpitaux de Paris) et le Dr Laura Marie-Hardy (La Pitié – Salpétrière) mènent une analyse complète de l’exome de familles atteintes de scoliose idiopathique. Autrement dit, cette équipe va étudier le code génétique de patients atteints de scoliose et appartenant à la même famille.
À Montréal (CHU Sainte Justine, Montréal, Canada), l’équipe du Pr Alain Moreau mène un projet d’épigénétique dont le but est de détecter les molécules d´ARN (microRNA) qui peuvent prédire le risque d´évolution de la scoliose via une analyse sanguine.
Il résulte de ses travaux que l´expression de miR-NORα2 est plus élevée chez les patients dont le risque de progression de la déviation est fort.
Quel impact pour le patient ? La fin des idées reçues
Les avancées ont permis de faire taire les rumeurs sur la responsabilité du cartable, de l’appareil dentaire ou même de la pratique d’un sport de raquette, dans la survenue d’une scoliose.
De plus, la mise en évidence d’une prévalence accrue justifie le dépistage ciblé de la scoliose dans la fratrie ou chez les enfants d’un patient souffrant de scoliose.
Depuis 2018 la Fondation, notamment par le biais des Scolimpiades – des sessions combinées de dépistage et d’animations sportives organisées sur tout le territoire – œuvre pour la généralisation d’un dépistage précoce et systématique.
La scoliose idiopathique reste donc un vaste champ d’investigation ?
Tant de questions restent posées ! Quelles sont ses causes ? Pourquoi ces scolioses sont-elles plus fréquentes chez la fille que chez le garçon ? Qu’est-ce qui détermine sa localisation ? Pourquoi certaines sont plus évolutives que d’autres ? Y-a-t-il d’autres anomalies associées actuellement inconnues ? Les centres d’équilibre jouent-ils un rôle ? Comment prévenir et traiter ces scolioses ?
Les chercheurs et leurs travaux
Pr Patrick Edery
Pr Florina Moldovan
Dr Guillaume Dugué
Pr René Castelein
Dr Steven de Reuver
Pr Serge Zakine
(Hôpital Trousseau, Paris, France) et Dr Laura Marie-Hardy (Institut du Cerveau, Paris, France) Lauréat 2019
Dr Laura Marie-Hardy
Pr Alain Moreau
Pr Nancy Miller
(Children’s Hospital Denver, États-Unis) Lauréat 2023
Pr Carol Wise
(Texas Scottish Rite Hospital, États-Unis) Lauréat 2024